Chapitre XXXV : Retour vers Hecat
Le voyage dans le warp se poursuivait, les navigateurs renégats dirigeant adroitement les vaisseaux du chaos sur les courants capricieux de l’Empyrean. La campagne qui s’achevait n’avait pas été aussi fructueuse que prévu pour l’Inferno Legion, mais les esclaves capturés et les ravages causés étaient satisfaisants aux yeux de Garkhan, sans compter sa nouvelle « acquisition ». De nombreux guerriers étaient tombés lors de l’attaque des Ultramarines, mais ces pertes pouvaient être comblées rapidement, et la guerre pourrait alors reprendre. Le seigneur du chaos quitta la baie de commandement pour se rendre dans ses quartiers, confiant les commandes au successeur d’Estebane, dont la tête était fichée sur une pique, au centre de la passerelle. La douleur qui brûlait son flanc était encore vivace, et son corps était incapable de la régénérer complètement. Maudissant Eraziel et les chevaliers du faux Empereur, Garkhan parcourut les coursives du croiseur, imaginant de quelle manière ils allaient payer. Il fallait d’abord qu’il réorganise ses forces sur Hécat, et, surtout, qu’il honore les Dieux Sombres pour leur aide. Il restait tant à faire ! Il avait toutefois l’éternité devant lui, pour peu que celle-ci lui soit accordée un jour. Il caressa le pommeau de l’épée accrochée à sa ceinture. Avec cet instrument de mort, il se sentait capable d’accomplir d’autres massacres, toujours plus sanglants, au nom des Quatre.
Enfin, il arriva devant ses « appartements ». Deux portes d’airains s’ouvrirent dans un grincement sinistre, révélant une ancienne chapelle primus, réaménagée selon les goûts du propriétaire actuel. L’ancien autel impérial avait été remplacé par un siège tapissé de peaux humaines couvertes de symboles chaotiques. De nombreux crânes s’entassaient des deux côtés du trône, ainsi que différents artefacts et globes de verres luisant d’une énergie démoniaque. Un peu partout, de grands cierges noirs illuminaient la pièce. Sur la droite, une bibliothèque contenait des dizaines d’ouvrages interdits, des recueils d’archives et d’autres documents ayant traversés les siècles. Garkhan était un guerrier, mais il ne négligeait pas les ouvrages traitant des stratégies de l’Astartes ou de la garde impériale, car ces fous y exposaient leurs tactiques, devenant ainsi prévisibles et vulnérables. Trop bornés, ou trop peu imaginatifs, certains ne déviaient jamais de leurs principes, au contraire de Garkhan et de ses officiers, qui cherchaient toujours à rester insondables lorsqu’ils échafaudaient leurs plans de bataille. Sur la gauche, enfin, on pouvait discerner un espace vide servant à l’entraînement martial, avec d’innombrables armes accrochées aux murs. De nombreuses bannières arborant la marque des Dieux du Chaos achevaient de décorer cet environnement sinistre. Congédiant ses gardes, le seigneur du chaos referma les lourds battants, afin de s’isoler et de méditer sur ses actes futurs. Il prit place sur son trône. Ses forces avaient profité de la confusion engendrée par la Treizième croisade noire d’Abaddon pour passer en force la porte Cadienne, et elles s’apprêtaient maintenant à passer par une autre porte, plus discrète et inconnue de l’Imperium. Une fois regroupées et réorganisées, les hordes de l’Inferno Legion et de ses alliés pourraient revenir au front. Garkhan se demanda s’il était utile de se joindre au Fléau dans sa guerre personnelle, vu la tournure des événements, mais la perspective d’autant de batailles et de victimes le fit frissonner de plaisir. De plus, une alliance avec la black Legion s’avérait généralement profitable. C’était décidément tentant…
Soudain, Garkhan se leva, dégaina l’épée et la regarda. Sa lame était complètement inerte, comme si l’entité qui l’habitait était assoupie.
Tout à coup, un léger spasme lui fit lâcher l’arme qui demeura suspendue dans le vide. Un feu démoniaque entoura brusquement l’épée et des courants éthérés soufflèrent la flammes des cierges. Une souffrance indicible plaqua au sol le champion chaotique, qui perdit le contrôle de ses mouvements et se prosterna à genoux devant l’épée. Des éclairs jaillirent de l’arme pour frapper son visage, et la douleur le fit hurler. Mais dans sa tête, il entendait clairement une voix maléfique qui lui chuchota ceci :
« Très bien, petit mortel… Et maintenant, si nous parlions de MES plans… »
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